Emmanuel Tugny – Délie, Objet de plus haute vertu (d’après l’oeuvre de Maurice Scève)

2019 – 16 titres – 48’05
Label : Boom Records / Inouïe Distribution
Style : Poésie, Post Rock
Origine : France, Bretagne, Saint Malo (35)
Date de sortie de l’album : 17 janvier 2020

Notre avis :


Par Mike S.

On a maintenant pris l’habitude de retrouver Emmanuel Tugny là où ne l’attendait pas. Là où on n’attend peut-être même personne d’ailleurs. Avec ce nouvel album, « Délie, Objet de plus haute vertu », l’artiste repousse encore les frontières de ses possibles en mettant en musique des poèmes récités par un autre auteur, le breton Christian Prigent. 

C’est dans une démarche similaire à son projet de 2017, Armor, d’après l’oeuvre de Tristan Corbière, qu’Emmanuel Tugny s’est attelé à mettre en musique les textes d’un poète disparu il y a près d’un demi-millénaire… Cette oeuvre a été publiée en 1544 presque dans l’anonymat, et restée ainsi jusqu’à maintenant, sauf pour quelques curieux, des amateurs de belles lettres et des bacheliers obligés de se pencher sur les dizains du poète.

C’est dans une atmosphère dense, pesante et électrique que Emmanuel Tugny a choisi de porter cette oeuvre à la lumière. La musique pourrait, en effet, très bien illustrer un film, un thriller bien noir. Pour planter ce décor sombre, il y a de vieux instruments, d’autres plus modernes, et des voix. Tantôt envoûtante, tantôt inquiétante, la musique se situe dans un registre Post Rock, fait d’ambiances et d’improvisations, comme pour son premier volet consacré à Tristan Corbière. La vielle de Marc Anthony, le violon de Cyrille Fouquer. Les voix du baryton Jean-François Bulart et de la chanteuse Sophie David. La batterie de Maël Follézou… Tout participe à l’intrigue de cette oeuvre atypique.

Et puis il y a la voix centrale. Non pas celle d’Emmanuel, qui s’est lui-même mis hors jeu, en lui préférant la voix plus mature de son propre père, Christian Prigent, grave et monocorde, récitant, un à un, dans un français à peine modernisé, les vers d’une ode consacrée à une dame, que l’auteur qualifiait d’Idole de sa vie. On sent, au travers de cette oeuvre autobiographique, que cette Délie a dû briser le cœur de Maurice Scève. Mais aussi que le poète a su transcender cet état pour le transmettre jusqu’au travers des siècles. Quant à Emmanuel Tugny, dans cet exercice, il s’applique à être la « simple » courroie de transmission, adaptant l’oeuvre passée aux codes musicaux d’aujourd’hui.

Un travail passionnant pour son auteur, un disque étrange et parfois obsédant pour l’auditeur.

 


Intégrant un triptyque, successivement centré sur le Corps, l’Âme et le Coeur, ce nouveau disque vient s’ajouter à celui dédié à Tristan Corbière en 2017, avant d’être complété, prochainement, par un troisième volet, consacré à Théophile Gautier.

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Line-up :
Emmanuel Tugny
Christian Prigent
Marc Anthony
Cyrille Fouquer
Jean-François Bulart
Sophie David
Maël Follézou

Tracklist :
1. A sa délie
2. L’œil trop ardent Dizain 1
3. Libre vivais Dizain 6
4. Ce lien d’or Dizain 12
5. Le corps travaille Dizain 56
6. Continuant Dizain 65
7. Ensevely Dizain 125
8. Souffrir non souffrir
9. L’heur de notre heur Dizain 136
10. Comme des rais Dizain 141
11. En divers temps Dizain 216
12. En moi saisons et âges finissants Dizain 407
13. Quand mort aura Dizain 408
14. Apercevant cet ange Dizain 409
15. Mont côtoyant le fleuve et la cité Dizain 412
16 Flamme si sainte Dernier dizain